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Brève n° 47

 

Pour les lettres classiques

Du nouveau sur la réforme du concours de l’ENS (Ulm)

Vers 2008-2009

 

Descriptif : Compte-rendu de la réunion du 7 décembre avec le jury du concours de l’ENS (fourni par l’APFLA)

 

Les opinions ici exprimées n’engagent pas la responsabilité des enseignants hellénistes du lycée Cézanne.

 

Malgré la satisfaction de rigueur sur l’excellence des candidats recrutés, c’est un sentiment d’inquiétude générale qui a dominé, de part et d’autre de la salle, où l’assistance était très nombreuse.

 

Inquiétude dont fait état Monique Canto-Sperber à propos du nombre de postes offerts aux agrégations, et en tout premier lieu, à l’agrégation de Lettres classiques (dont on attend encore la publication du nombre de postes mis au concours 2008)

 

Inquiétude à propos des changements entraînés par le nouveau contexte universitaire qui se dessine (loi sur l’autonomie des.universités) : pour que l’ENS occupe la place qui lui revient dans le nouveau dispositif de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, Monique Canto-Sperber rappelle que l’ENS désormais délivre un diplôme de fin d’études qui permet, en validant la formation reçue, une reconnaissance extérieure de l’Ecole, des masters littéraires, où peuvent s’inscrire les étudiants, comme à l’ université, enfin que l’ENS est une Ecole doctorale où les étudiants peuvent obtenir un diplôme de doctorat.

 

Inquiétude sur ce nouveau concours que l’ENS met en place : J.C.Darmon rappelle que la session 2008 sera la dernière de l’ancien concours, puisque à partir de 2009 sera mise en place la Banque d’épreuves communes (avec l’ENS-LSH) où seront communes les épreuves de philosophie, histoire et version de langue vivante. La question de l’épreuve de dissertation française restant en suspens (malgré les avancées des discussions au sein de la commission de français qui réfléchit là-dessus). J.C.Darmon rappelle aussi que l’ENS a accepté la mise en place de la BEL pour ne pas bloquer l’indétermination de l’hypokhâgne, à laquelle elle tenait en premier lieu. Puis J.C.Darmon commente rapidement le rapport de jury, qui est en ligne, en recommandant aux préparateurs comme aux élèves de s’y reporter.

 

Jury de français

 

Devant l’absence de questions posées dans la salle, manifestement satisfaite des sujets de l’année dernière, le jury se contente de dire que le texte de Montesquieu n’a pas été bien compris, faute d’avoir été bien contextualisé. Dans la salle C.Suzzoni s’étonne que d’un côté on se félicite de l’excellent niveau des candidats, et que de l’autre on déplore qu’ils aient mal compris le texte proposé.

 

Jury de langues anciennes

 

- Les épreuves de l’année dernière

 

Le jury de GREC reconnaît, pour l’épreuve de version, que le texte de Platon était plus difficile que celui d’Euripide, de l’année précédente, mais qu’il a permis un très bon échelonnement des notes.

Pour l’oral, il rappelle que les textes proposés ont autour de 180 mots, qu’ils sont assortis de notes précisant le sens de certains mots : des exemples de billets figurent dans le rapport du concours, et permettent de se rendre compte des exigences du jury. Une liste lexicale est aussi proposée, qui indique le vocabulaire de base à connaître. Enfin, les textes classiques sont le plus souvent proposés (3/4 des textes pour ¼ de textes de l’époque impériale).

Quant au commentaire, il doit avant tout être bref (les candidats ne disposant pas plus de 3 à 4 minutes), donc synthétique, en allant à l’essentiel.

Enfin, le jury rappelle l’importance d’Homère, qui peut s’il est bien traduit améliorer la prestation, de même d’ailleurs qu’une bonne reprise, qui est capitale pour l’établissement de la note, quand on n’a pas bien compris le texte en première lecture.

Le jury de LATIN reconnaît lui aussi que le texte de Tacite était assez difficile, mais qu’une copie a mérité un 20 vu l’excellence de l’ensemble version + thème. Pas de remarques spéciales pour l’oral (en latin, à l’inverse du grec, le jury demande au candidat le commentaire avant la reprise, alors qu’en grec le candidat a le choix de le faire après la reprise), sauf qu’il met en garde sur la longueur des introductions faites avant de traduire le texte ; mieux vaut garder ce qu’on a à dire pour le commentaire.

 

- Nouvelles épreuves

 

1. Discussion générale

Devant l’inquiétude légitime des collègues, la direction de l’ENS, comme l’Inspecteur général P.Charvet justifient la nécessité de la réforme : il fallait échapper à la menace de disparition des petits effectifs en HK, donc rendre la langue ancienne obligatoire, si on voulait conserver la spécificité littéraire de nos classes ; il fallait aussi s’adapter à un nouvel horizon, sous peine de disparaître : l’ENS déplorant la paralysie de son recrutement à cause du poids des langues anciennes qui faisait fuir d’excellents historiens ou philosophes vers l’ENS-LSH, il était donc nécessaire, pour éviter ce que demandaient certains à l’ENS ( c’est-à-dire la disparition de l’obligation de la langue ancienne) de ne proposer qu’aux seuls spécialistes de lettres classiques les épreuves traditionnelles et faire des épreuves plus accessibles aux non-spécialistes. Voilà pourquoi, dit J.C.Darmon, il n’est pas nécessaire d’obliger les futurs khâgneux Ulm à faire 4 heures de langue ancienne en HK. : « qu’ils ne se bousculent pas pour faire les quatre heures ! » Il faut que les Hypokhâgneux et les préparateurs comprennent que l’HK est indéterminée dans la mesure où même un élève qui n’a suivi que les deux heures de latin ou de grec obligatoires peut passer en khâgne Ulm.

Les collègues, dans la salle, protestent en disant qu’on leur demande quelque chose d’impossible, d’une part parce que deux heures ne sont absolument pas suffisantes pour former correctement un latiniste ou un helléniste, et d’autre part, parce que le cours à deux vitesses est vraiment problématique. P.Charvet répond que dans les lycées où il y a deux hk, on peut différencier selon les hk les groupes à deux heures et les groupes à 4 heures. (mais les lycées avec une seule Hk que font-ils ?).De toute façon, ajoute le jury, il y aura une phase d’expérimentation de deux ans.

Quant à l’heure de culture, les collègues obtiennent un satisfecit de la part de l’IG admirative du travail fourni. Cependant certains dans la salle se plaignent de la lourdeur de ce programme s’il devait changer tous les ans en HK. P.Charvet dit que cette question est à l’étude et qu’on pourrait peut-être garder plus longtemps le thème au programme.

 

2. Ecrit :

Aucun changement pour les lettres classiques. Mais précisons cependant qu’il y a une différence entre le latin et le grec (comme c’était déjà le cas) : en latin, la version (et le thème) sont sans programme, mais en grec (du fait que c’est la même version qui est donnée aux spécialistes de lettres classiques et aux autres) la version sera sur le programme du thème.

Pour les non spécialistes, il y aura au choix une version (latin ou de grec) portant sur le thème, ou une version de 6 à 8 lignes prises dans un ensemble donné avec sa traduction en français (sauf le passage à traduire !) et un commentaire (assorti on non de questions), chacune des parties de l’épreuve comptant (en principe…) 10 et 10. Il est évident que dans cette épreuve les notes seront moins discriminantes que dans l’épreuve de version « sèche » : moins facile pour obtenir de très bonnes notes, plus facile pour éviter des catastrophes aux candidats faibles en langues anciennes.

Pour plus de lisibilité, voici le tableau de la nouvelle épreuve :

 

Lettres classiques : (version latine + thème latin : sans programme) + (version grecque portant sur le thème)

 

Non-spécialistes : (version latine ou version grecque : sur programme) OU BIEN (version latine ou grecque + commentaire)

 

L’apfla avait demandé à l’IG comme à l’ENS que le jury nous dise ses attentes concernant le commentaire. Paul Demont, qui a participé de près à la mise en place de cette réforme, s’est donné la peine, bien qu’il ne soit pas membre du jury, d’esquisser un bref commentaire d’un texte qu’il a distribué. Nous lui en sommes extrêmement reconnaissants mais nous nous étonnons que les professeurs de l’E.N.S ou les membres du jury lui en aient confié la charge au lieu de l’assumer eux-mêmes (d’autant que nous n’avons pas entendu de commentaire sur un texte latin).

Pour résumer le bref commentaire que nous avons entendu sur un petit passage de la Cyropédie (VIII, 4, §18-23), ou plutôt pour expliciter les attentes qui le justifiaient, nous pouvons retenir :

·        l’importance du contexte (donné par l’ensemble où s’inscrit le texte à commenter) : en l’occurrence, une fin de banquet (propos propices à l’amour, et aux propos licencieux) (cf. la fin du Banquet du même Xénophon)

·        les références obligées aux grands textes sur le sujet : puisqu’il était question de la ressemblance ou la dissemblance dans un couple, il fallait mettre le texte en perspective avec le Banquet de Platon (discours d’Aristophane) et le Lysis (l’amour comme recherche du semblable ou du contraire)

·        la prise de position sur le problème dans le texte (harmonie du couple recherchée dans le mariage pour Cyrus-Xénophon)

·        le mouvement même du texte : étude du vocabulaire, transformation par rapport au contexte (l’interlocuteur, devenant, d’invité d’honneur, un « petit chien » dans la comparaison faite par Cyrus), et illustration par le texte même de ce qui était dit puisque Cyrus, réunissant l’union des contraires (rire et froideur) semblait montrer dans l’ordre de la royauté l’union harmonieuse des contraires qu’il fallait rechercher dans le mariage.

 

3.Oral :

On avait distribué aussi à l’ouverture de la séance le texte de l’arrêté concernant les nouvelles épreuves, et, surprise, on s’aperçoit alors que le texte ne correspond pas à l’épreuve d’oral prévue. Cafouillage dans le jury…on constate le manque de sérieux de ceux qui ont la charge de ce dossier….(mais quels sont-ils, finalement ?).

David Daix (jury de grec) prend la parole pour dire qu’il s’agit d’une coquille, et que l’épreuve d’oral ne propose pas, comme l’indique à tort le texte officiel, un ensemble bilingue + un passage à traduire et un commentaire, mais un texte à traduire portant sur le thème pour les non-spécialistes, et un texte à traduire portant sur le thème « plus élargi » pour les lettes classiques. Donc l’épreuve reste fondamentalement identique à celle des années précédentes ; (remarquons cependant que le non-spécialiste se verra proposer à l’écrit une version de 8 lignes, soit à peu près 120 mots, (c’est ce qu’on nous a dit) avec dictionnaire et en 6 heures, alors qu’il aura à traduire, à l’oral en une heure un texte de 180 mots sans dictionnaire…même si les notes explicatives sont nombreuses, l’oral semble bien plus difficile que l’écrit…)

Pour finir Claude Boichot prend la parole pour reprocher aux professeurs de bloquer la réforme, pour dire aussi qu’il a constaté que peu de lycées l’appliquaient vraiment (un collègue intervient pour dire que c’est parce que la loi propose, avec ce cours à deux vitesses, des dispositions très difficiles à mettre en place ; mais C.Boichot dit que dans ces conditions ce qui menace c’est qu’on supprime les deux heures de spécialisation…) et il rappelle qu’à l’intérieur du système des Grandes Ecoles, les classes préparatoires sont très fragiles du fait du petit nombre de places offertes dans les ENS (250 contre 17000 pour les écoles d’Ingénieurs et 18000 pour les écoles de commerce). Les professeurs doivent donc se plier à ce que leur demandent les Ecoles. Une ultime intervention dans la salle souligne le caractère absolument ingérable de la classe de langue ancienne en khâgne du fait de son hétérogénéïté (encore plus grande qu’auparavant, puisque maintenant dans les « continuants » comme dans les débutants, il y aura des élèves qui auront fait 2 ou 4 heures en HK…)

Peine perdue ! « les excellents préparateurs sauront relever le défi » nous a-ton répondu… Autrement dit « marche ou crève ! »

 

DATE DE PUBLICATION EN LIGNE : 10 décembre 2007

 

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