Poursuivons notre cheminement avec Parménide d’Élée. Il figure, avec
Empédocle ou Héraclite, parmi les philosophes présocratiques, dont la
conception de l’univers a été redécouverte par certains des plus grands savants
du XXe siècle, notamment Niels Bohr, Werner Heisenberg ou Erwin Schrödinger,
qui sont à l’origine de l’élaboration de la théorie de la mécanique quantique.
Rappelons en outre que les présocratiques ont influencé Heidegger et l’ont
conduit à replacer l’ontologie (la théorie de l’être) au cœur de la
métaphysique. Nous y reviendrons. Mais pour le moment, laissons à Brasillach le
soin de nous présenter Parménide.
« Parménide
est un des plus grands noms de la philosophie grecque présocratique, le
fondateur de l’école d’Élée, le maître de Zénon. Si l’on en croit Platon, qui
lui a consacré un de ses dialogues les plus riches, il connut à Athènes Socrate
tout jeune. C’est un homme, en tout cas, de la fin du VIe siècle et du début du
Ve avant notre ère. Il n’avait pas renoncé à la forme poétique, pour laquelle
il avait à coup sûr des dons éblouissants, comme nous le prouve le prologue de
son œuvre, véritable « nuit de Parménide » comme il y a une
« nuit de Pascal ». C’est le philosophe de l’Être, qu’il définit par
la non-contradiction, mais qui, pour lui, est en outre, et bizarrement,
homogène et sphérique. Il ne reste malheureusement de lui que des fragments peu
nombreux, des résumés obscurs, où l’on peut, comme Nietzsche l’a fait, aller
chercher avec curiosité le souvenir d’une grande âme abstraite
« complètement pétrifiée par la raideur logique et presque
transformée en une machine à penser », mais sauvée par l’éclat d’une forme
qui ne réussit pas à tout oublier de la chaleur de la vie. »
Je pense, donc je suis
Allons,
je vais parler, et toi, prête l’oreille à ce que tu vas entendre de moi :
Pour
atteindre à la connaissance de l’univers, il n’y a que deux voies.
L’une
affirme l’existence de l’Être, et dit qu’il est impossible que l’Être ne soit
pas.
Voilà
la route de la Certitude, c’est la méthode qui accompagne la Vérité du même
pas.
L’autre
voie affirme l’inexistence de l’Être, l’existence du Non-Être :
Je dis
que cela n’est qu’un mauvais sentier où l’on ne peut rien connaître.
On ne
peut pas saisir le Non-Être, puisqu’il est hors de notre portée.
On ne
peut pas le définir. Tandis qu’il n’y a pas de différence entre l’Être et sa
Pensée.
Traduit
du grec ancien par Robert Brasillach, Anthologie de la poésie grecque,
Stock, 1950
DATE DE PUBLICATION EN LIGNE : 8 JANVIER 2009