Brève n° 211
Remarquable
étude de Michel Casevitz sur ce thème (« Le vocabulaire de la colonisation
en grec ancien », 1985).
Le
vocabulaire actuel lié à la colonisation pose de multiples problèmes à
l’historien car il renvoie surtout aux colonisations modernes. Il faut donc
être prudent et éviter tout anachronisme dès lors que l’on s’intéresse au
phénomène de la colonisation dans l’Antiquité. Rappelons que les termes de
colonie et de colon sont à l’origine des termes latins (colonia, colonus)
; jusqu’au XIVe siècle, le colonus était le cultivateur, le
fermier. Au XVIIe siècle le sens de colon s’applique à l’habitant
d’une colonie. A partir du XVIIe siècle le terme est utilisé en
français pour désigner un territoire dominé et administré par un pouvoir
étranger (notamment lorsqu’il est question de l’Antiquité romaine mais aussi
des colonies d’Amérique du Nord). Puis au siècle suivant, le sens prend une
dimension nettement plus économique. C’est aussi au XVIIIe siècle
qu’apparaît le terme de colonisation emprunté à l’anglais (colonization),
ce qui montre aussi le poids du Royaume-Uni dans la formation des empires
coloniaux à cette époque. Enfin, des mots comme colonialisme sont utilisés au
XIXe siècle sous l’influence des théories marxistes et servent à
mettre en évidence l’exploitation des terres et des hommes dans ces régions.
L’apoikia
(au pluriel apoikiai) est un terme polysémique et par conséquent
difficile à traduire. En premier lieu, c’est l’expédition elle-même qui mène un
groupe d’émigrés d’une région à l’autre de la Méditerranée. Il s’agit donc d’un
phénomène collectif de migration (un exode), dont la conduite est assurée par
un oïkiste (ou oeciste) qui joue le rôle de chef de l’expédition.
Souvent le terme d’apoikia est traduit par « colonie de … », marquant
ainsi l’origine et la dépendance plus ou moins étroite avec la métropole.
En
second lieu, l’apoikia est la fondation d’un nouvel établissement (donc
une ktisis). L’oïkiste devient le fondateur de la nouvelle cité
et il est honoré après sa mort. On parle aussi d’archégète pour certaines
fondations comme Naxos, mais il s’agit là de l’épithète d’un dieu (en
l’occurrence Apollon) ou d’un héros protecteur d’une apoikia.
Au
cours de l’époque classique le terme d’apoikia a évolué prenant le sens
de colonie de peuplement à vocation militaire. A partir d’Alexandre le Grand on
parle plus souvent de katoikia, soit d’établissement militaire, sens qui
restera valable dans le monde romain.
DATE DE
PUBLICATION EN LIGNE : 1er
AVRIL 2009